Ci-dessous le texte du discours royal prononcé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu le glorifie, à l'occasion de l'ouverture de la première session de la cinquième année de la neuvième législature, au siège du Parlement :
Louange à Dieu, prière et salut sur le Prophète, ainsi que sur sa famille et ses compagnons, Mesdames et Messieurs les honorables parlementaires,
Nous sommes heureux d'ouvrir cette cinquième année de législature. C'est une occasion annuelle de s'adresser aux représentants de la nation sur diverses questions nationales. Cette année législative revêt une importance particulière car c'est la dernière année de la législature en cours, ce qui nécessite la finalisation de l'établissement des institutions constitutionnelles. Elle intervient également après les premières élections locales et régionales, dans le cadre de la nouvelle Constitution, et après la mise en place du Conseil de la Chambre des conseillers dans sa nouvelle formulation. Nous tenons ici à féliciter les membres du Conseil de la Chambre des conseillers, ainsi que les présidents des conseils régionaux et locaux et tous les élus, pour la confiance qui leur a été accordée, en priant Dieu Tout-Puissant de vous accorder à tous succès et réussite dans vos missions. Cependant, nous ne devons pas considérer que tout est achevé. Les élections ne sont pas une fin en soi, mais plutôt le véritable début d'un long parcours qui commence par l'établissement des institutions et la légitimité qui en découle. Plus que cela, la représentation des citoyens est une grande responsabilité pour les élus et les partis politiques, que ce soit en respectant leurs engagements envers les électeurs ou en répondant à leurs préoccupations urgentes. Il s'agit d'une responsabilité nationale qui exige de chacun de relever le défi de l'époque historique que notre pays traverse. Il ne nous reste qu'une seule option, celle d'établir des institutions régionales efficaces pour que le Maroc ne manque pas ce rendez-vous important avec l'histoire. Cependant, il est important de souligner que la vie politique ne doit pas être centrée sur les individus, mais plutôt sur les institutions. Les individus, quel que soit leur statut, sont éphémères, tandis que les institutions sont permanentes. Elles sont la véritable garantie des droits des citoyens et des services dont ils ont besoin, et nous refusons qu'elles soient assujetties aux caprices et aux désirs des individus. Mesdames et Messieurs les honorables parlementaires,
Les citoyens ont exprimé leur voix, mais je souhaite profiter de cette plateforme pour adresser un message à ceux qui n'ont pas réussi lors de ces élections. Il ne faut pas perdre espoir et ils doivent garder la tête haute pour les services qu'ils ont rendus à la nation et aux citoyens. Ils doivent également prendre conscience que les Marocains sont devenus plus matures dans leur approche des élections et plus stricts dans le jugement des élus sur leur bilan de travail.
Ils doivent également pratiquer l'autocritique constructive pour corriger les erreurs et les déséquilibres, et continuer à travailler dur dès maintenant, sans relâche, dans le but de gagner la confiance des électeurs lors des prochains scrutins.
C'est la nature même de la démocratie authentique, qui implique l'alternance et la rotation du pouvoir, ainsi que la gestion des affaires publiques. Celui qui n'a pas gagné aujourd'hui peut être le gagnant demain.
Cependant, nous refusons de pleurer sur les ruines et de formuler de fausses accusations à l'encontre des autorités responsables de l'organisation des élections. Les garanties fournies sont comparables à celles des plus grandes démocraties du monde, voire même supérieures à celles de nombreux pays.
Bien sûr, ceux qui se considèrent lésés en raison de certaines dérives isolées courantes dans la pratique démocratique ont recours à la justice.
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Nous avons enregistré avec une grande fierté la forte participation des habitants de nos régions du sud lors des dernières élections, ce qui témoigne de l'attachement des fils du Sahara à l'unité territoriale et au système politique de leur pays, ainsi que de leur volonté de s'impliquer activement dans les institutions nationales.
Nous tenons à souligner que la légitimité populaire et démocratique acquise par les élus, choisis librement, en fait de véritables représentants de la population du Sahara marocain, et non une minorité vivant à l'étranger tentant de s'autoproclamer représentante sans aucune légitimité.
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
La Constitution a accordé à la Chambre des Conseillers une place particulière dans la construction institutionnelle nationale, dans un esprit d'intégration et d'équilibre avec la Chambre des représentants. Il se distingue par une composition diversifiée et multidisciplinaire, regroupant des expertises et des compétences locales, professionnelles, économiques et sociales. Il doit donc être un espace de débat constructif, d'expertise, de pondération et d'objectivité, loin de toute considération politique.
Il est également nécessaire d'exploiter la complémentarité entre les deux chambres du Parlement pour améliorer leur performance et la qualité des législations qu'elles adoptent.
Malgré tous les efforts déployés, l'image qui persiste dans l'esprit de nombreux citoyens est celle des conflits et des surenchères entre la majorité et l'opposition, parfois au sein du Parlement et même au sein des rassemblements politiques et des médias.
J'ai déjà mentionné auparavant, sur cette plateforme, que le discours politique ne répond pas toujours aux attentes des citoyens. Je tiens à souligner ici que l'orientation vers des conflits marginaux se fait souvent au détriment des questions urgentes et des véritables préoccupations des citoyens, ce qui conduit à une insatisfaction populaire à l'égard de l'action politique en général et à un désintérêt du citoyen pour le véritable rôle du Parlement.
Le Parlement doit être le reflet des préoccupations des citoyens et un espace de dialogue sérieux et responsable sur toutes les grandes questions nationales.
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Le travail qui vous attend au cours de cette année pour compléter l'établissement des institutions ne supporte pas de perdre du temps dans des conflits marginaux.
Les projets de textes législatifs qui vous seront présentés sont d'une grande importance et sensibilité. C'est pourquoi nous tenons à rappeler au gouvernement et au Parlement la nécessité de se conformer aux dispositions de l'article 86 de la Constitution, qui fixe la fin de cette législature comme date limite pour soumettre les lois réglementaires à l'approbation du Parlement.
Nous mentionnons ici, par exemple, les projets de lois réglementaires relatifs à la mise en œuvre du statut officiel de la langue amazighe, au Conseil national des langues et de la culture marocaine, à l'exercice du droit de grève et au Conseil de tutelle.
Ces grandes questions nationales nécessitent de votre part, majorité et opposition, gouvernement et Parlement, de privilégier l'esprit de consensus positif et de vous éloigner des surenchères politiques.
En ce qui concerne la mise en œuvre du statut officiel de l'amazighe pour qu'elle puisse assurer son rôle à l'avenir, il convient de rappeler que l'arabe et l'amazighe ont toujours été des éléments d'unité et ne seront jamais une source de conflit ou de division.
Quant au Conseil national des langues et de la culture marocaine, il s'agit de la création d'un conseil regroupant toutes les institutions concernées par ces domaines et non de la mise en place d'une structure générale pour des institutions indépendantes.
La formulation du projet de loi réglementant le droit de grève nécessite des consultations larges et l'adoption d'un esprit de consensus constructif afin de garantir les droits des travailleurs, les intérêts des employeurs et l'intérêt national.
En ce qui concerne les textes présentés au Parlement, nous appelons à accélérer l'approbation des projets de lois réglementaires concernant le pouvoir judiciaire, ainsi que le projet de loi sur la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination.
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Ce qui nous importe, ce n'est pas seulement l'adoption des lois et leur publication au Journal officiel, mais également la mise en œuvre de ces législations et l'installation des institutions.
La position des institutions est mesurée par leur capacité à remplir leurs missions et à servir les intérêts des citoyens.
Dans ce cadre, nous renouvelons l'appel à accélérer l'élection des membres de la Cour constitutionnelle, dont la Constitution confère au Parlement le pouvoir de les nommer, afin de pouvoir les installer dans les plus brefs délais. C'est ce que nous avons appelé à faire dans le discours de l'année dernière.
Il est également nécessaire d'activer les textes juridiques relatifs au Conseil de la concurrence et à l'Instance nationale de probité et de prévention de la corruption.
La question reste posée : pourquoi les lois de plusieurs institutions n'ont-elles pas été mises à jour, malgré quatre ans depuis l'adoption de la Constitution ? Et qu'attendons-nous pour établir les nouvelles institutions créées par la Constitution ?
Nous mentionnons notamment quelques institutions des droits de l'homme et de contrôle, le Conseil consultatif de la famille et de l'enfance, le Conseil consultatif de la jeunesse et du travail associatif.
Mesdames et Messieurs les parlementaires respectés,
L'année législative que nous inaugurons aujourd'hui est pleine de défis et nécessite un travail acharné et un véritable esprit de patriotisme pour compléter l'établissement des institutions nationales.
Les institutions ne concernent pas seulement la majorité ou l'opposition, mais elles sont des institutions qui doivent servir les citoyens sans aucune autre considération.
Nous appelons donc à l'adoption d'un consensus positif sur toutes les grandes questions de la nation. Cependant, nous rejetons les compromis négatifs qui cherchent à satisfaire des aspirations personnelles et des objectifs factionnels au détriment des intérêts de la nation et des citoyens, car la patrie doit rester au-dessus de tous.
Soyez, que Dieu vous protège, à la hauteur de l'intégrité qui vous est confiée, pour le bien de notre chère patrie.
"Dieu sait ce qu'il y a de meilleur dans vos cœurs, il vous accordera donc le meilleur". Dieu est le plus véridique.
Que la paix, la miséricorde et les bénédictions de Dieu soient avec vous.
Source : Wamak