Rencontre parlementaire à Rabat mettant en évidence l'importance de l'éducation, du travail et de l'entrepreneuriat en tant que voies pour réaliser l'autonomisation économique des femmes.
Des parlementaires marocains et européens ont souligné lors d'une rencontre organisée ce mercredi par la Chambre des Conseillers en partenariat avec le Conseil de l'Europe et son association parlementaire, la nécessité de se concentrer sur l'éducation, le travail et l'entrepreneuriat en tant que voies essentielles pour réaliser l'autonomisation économique des femmes.
Les participants à la première session de cette rencontre parlementaire, qui a également vu la participation de responsables gouvernementaux et d'experts, ont noté que les conséquences de la pandémie de COVID-19 ont creusé les écarts entre les sexes en termes d'accès au marché du travail, de salaires, de compétences et d'accès aux postes de direction. Ils ont appelé à partager les expériences, les connaissances et les bonnes pratiques en matière de promotion et d'autonomisation économique des femmes, compte tenu de la valeur ajoutée que leur activité économique apporte en termes de création d'emplois, de génération de richesses et, par conséquent, de progrès dans divers domaines de développement.
Dans ce contexte, Elvira Kovasi, membre du Parlement serbe et de la Commission de l'égalité et de la non-discrimination de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, a souligné la nécessité de développer des mécanismes de lutte contre la discrimination et de mettre en place un système de protection permettant un accès égal aux droits entre les sexes. Elle a noté que la plupart des recherches confirment l'absence de représentation équitable dans la vie publique et que par conséquent, le taux d'emploi des femmes reste inférieur à celui des hommes.
Mme Kovasi considère que le soutien à l'entrepreneuriat peut contribuer à améliorer la position des femmes dans la société et avoir des effets positifs sur la croissance économique et la réduction du chômage. Elle souligne également l'importance de l'attention portée à la formation, à l'éducation, à l'accès au financement et au soutien des femmes dans la gestion de leurs propres projets.
La parlementaire a mis en lumière l'expérience serbe qui repose sur une loi sur l'égalité des genres, qui établit des mesures spécifiques et générales pour promouvoir l'égalité dans le domaine de l'emploi, de l'entrepreneuriat, des soins de santé, des technologies de l'information et d'autres secteurs. Elle souligne l'importance de protéger les groupes vulnérables en mettant en place des mesures incitatives pour les femmes enceintes ou les victimes de violence basée sur le genre, tout en insistant sur la nécessité de prendre en compte la situation des femmes travaillant en milieu rural.
De son côté, Adel Bedil, conseiller parlementaire et membre de la Commission de l'égalité et de la non-discrimination de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, a déclaré que malgré les importantes réformes juridiques et réglementaires visant à renforcer la position juridique des femmes au Maroc et à adapter la législation nationale aux conventions internationales relatives aux droits des femmes, cet effort de réforme reste ouvert en attendant de répondre à toutes les exigences de l'égalité des sexes et de lutter contre toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.
M. Bedil a ajouté que plusieurs projets ambitieux ont été adoptés, notamment le "Programme national intégré pour l'autonomisation économique des femmes et des filles d'ici 2030", qui est conforme aux exigences constitutionnelles, aux engagements gouvernementaux, aux objectifs de développement durable et aux diverses conventions internationales ratifiées. Il a également mentionné l'initiative nationale pour le développement humain, le projet de généralisation de la couverture sociale pour les groupes vulnérables et les changements structurels visant à renforcer l'égalité des sexes dans l'éducation, l'emploi et l'entrepreneuriat.
Lors de son discours, la ministre de la Solidarité, du Développement Social, de l'Égalité et de la Famille, Awatef Hiyar, a souligné que le nouveau modèle de développement repose sur l'adoption de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la réalité, offrant ainsi aux femmes une plus grande opportunité de participation au développement économique et social, ainsi que la création d'entreprises performantes capables de fournir davantage d'opportunités d'emploi.
La ministre a souligné que dans le but d'améliorer les indicateurs sociaux et économiques des femmes, en cohérence avec les efforts déployés pour atteindre les objectifs de développement durable à l'horizon 2030, le programme gouvernemental prévoit le soutien aux composantes de l'État social à travers "la création d'au moins un million de postes de travail nets au cours des cinq prochaines années, et l'augmentation du taux d'activité des femmes à plus de 30% contre 20% actuellement".
Dans le cadre de ces références et engagements, Mme Hiyar a déclaré que le ministère adopte une approche participative avec tous les acteurs nationaux et locaux, faisant des femmes des actrices essentielles dans la réalisation du développement économique. Elle a mentionné le programme "Maroc de l'autonomisation et de l'entrepreneuriat", qui repose sur l'éducation et la formation, l'emploi et le leadership des femmes, l'entrepreneuriat et l'économie sociale et solidaire, le soutien aux femmes rurales et aux femmes en situation de vulnérabilité, ainsi qu'un environnement durable favorable aux femmes, les encourageant et soutenant leurs droits.
De son côté, l'experte internationale en genre, Ann Ravanona, a salué l'autonomisation économique importante des femmes marocaines, soulignant que tout progrès sur le chemin du changement après la pandémie de COVID-19 ne peut être réalisé qu'en impliquant pleinement les femmes et en investissant dans les différentes opportunités disponibles grâce à la participation des femmes.
Dans ce contexte, Mme Ravanona, entrepreneure et femme d'affaires, a souligné que les fondements essentiels de l'autonomisation des femmes devraient porter sur l'éducation, l'environnement de travail et l'accès à l'entrepreneuriat. Elle a présenté les mesures figurant dans les documents du Conseil de l'Europe concernant l'éducation et la formation, qui visent à autonomiser les filles grâce à une éducation et une formation tout au long de la vie. Elle a également souligné l'importance de lutter contre les stéréotypes chez les apprenants des écoles primaires et de favoriser leur ouverture aux employeurs, ainsi que de combattre l'illettrisme numérique.
L'experte internationale a également appelé à lutter contre l'"illettrisme financier" en enseignant aux filles dès leur scolarisation les principes des affaires financières pour les initier à la réflexion sur l'investissement et ses outils. Elle a également souligné l'importance de la pratique sportive, en raison de son lien avec l'esprit de leadership, affirmant que 94% des femmes occupant des postes de direction dans des centres de décision sont engagées dans des activités sportives.
En ce qui concerne l'entrepreneuriat féminin, l'experte a appelé à faciliter l'accès au financement, considérant cela comme une question cruciale tant pour les pays du Nord que du Sud. Elle a encouragé à réfléchir à de nouvelles formes d'autonomisation des femmes en matière d'accès au financement, telles que les prêts garantis, et a souligné l'importance pour les gouvernements de fournir une partie du capital nécessaire à l'investissement. Elle a également mentionné la mobilisation des ressources financières provenant du secteur privé pour les utiliser dans le financement des petites et moyennes entreprises, ainsi que l'intégration d'une approche axée sur le genre dans les marchés publics.
Dans le cadre du partage d'expériences en matière d'entrepreneuriat, la présidente régionale de l'Association des Femmes Entrepreneurs au Maroc, Shuaa Belbzioui, a présenté l'expérience de l'association à travers l'initiative "Incubateurs de projets", qui accompagne les femmes porteuses de projets individuellement et collectivement, et leur offre un espace dédié à l'entrepreneuriat. Elle a souligné que les femmes entrepreneures sont confrontées à des obstacles liés au faible niveau d'éducation, à l'accès à l'information et donc à l'accès au financement.
Dans ce contexte, Mme Belbzioui a souligné que l'Association "Femmes Entrepreneurs au Maroc" facilite l'accès au financement pour les entrepreneures dans tous les secteurs, en particulier les femmes rurales. Elle a mis en avant le travail de l'association dans la région de Tétouan-Tanger-Al Hoceïma pour accompagner les femmes dans la création de leurs propres entreprises.
Mme Belbzioui a alerté sur le fait que les facteurs socio-économiques poussent les femmes à se sentir "incapables", appelant à corriger certaines perceptions car "les femmes sont capables de réussir en tant qu'entrepreneures, surtout qu'elles travaillent davantage que les hommes, à la fois au travail et à la maison, ce qui leur permet d'atteindre l'indépendance économique".
Il convient de mentionner que cette réunion, organisée sous le thème "Renforcer l'autonomisation économique des femmes : emploi, entrepreneuriat, formation", s'inscrit dans le cadre du projet "Renforcement du rôle du Parlement dans la consolidation de la démocratie au Maroc 2020-2023", financé par l'Union européenne et mis en œuvre par le Conseil de l'Europe.
La réunion aborde diverses questions liées aux inégalités entre les sexes, notamment en ce qui concerne l'intégration économique des femmes, les écarts de salaires, les difficultés d'accès à l'emploi, l'évolution professionnelle relativement lente voire stagnante, ainsi que la répartition injuste entre les sexes dans certains secteurs économiques et la faible représentation des femmes dans les postes stratégiques.